Vigne et climat : l’INAO accélère

Le Comité national des appellations d’origine viticoles examine plusieurs demandes d’adaptation formulées par des Organismes de défense et de gestion (ODG), dont celui de l’AOP Côte Roannaise, qui souhaite revoir les critères de délimitation de son aire parcellaire afin de privilégier des situations plus fraîches.

Reconsidérer, avec modération, les limites géographiques des aides d’appellation pour tenter d’atténuer, sinon de contourner, les méfaits du changement climatique sur la typicité des vins ? Tel est le motif invoqué par l’AOP Côte Roannaise (Loire) pour solliciter, auprès de l’INAO, une demande de modification de la délimitation de son aire parcellaire. Il s’agit d’une première en France et à laquelle a accédé le Comité national des appellations d’origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées et des boissons spiritueuses (CNAOV).

Orientation et altitude des parcelles

Réunie le 11 septembre dernier, la commission permanente du Comité national a salué « le travail d’analyse de l’ODG et a nommé une commission d’enquête afin d’instruire cette demande qui s’inscrit pleinement dans une perspective de durabilité de l’appellation ». L’AOP Côte Roannaise, qui totalise 182ha plantés sur une aire délimitée de 1825ha, est confrontée à des sécheresses à répétition et à phénomènes de débourrement précoce qui altèrent à la fois les volumes et la typicité des vins, au degré toujours plus élevé. La demande de l’ODG est également motivée par des considérations foncières, l’urbanisation croissante de sa zone d’appellation grignotant la zone d’appellation historique.  L’ODG demande ainsi à revoir les critères de délimitation afin de privilégier des situations plus fraîches en jouant sur l’orientation et l’altitude.

Variétés d’intérêt à fin d’adaptation

Au cours de la même séance, le CNAOV a par ailleurs lancé les procédures nationales d’opposition du cahier des charges des AOP Costières de Nîmes, AOC Alsace et AOC Crémant d’Alsace, suite à la demande des ODG d’introduire des Variétés d’intérêt à fin d’adaptation (VIFA). Depuis 2021, l’INAO permet en effet aux ODG d’introduire des cépages résistants aux maladies ou adaptés aux évolutions climatiques, dans la limite de 5% de la surface de de 10% des assemblages, afin de ne pas modifier substantiellement les caractéristiques des vins. « Les VIFA sont aujourd’hui utilisées dans la majorité des bassins viticoles », relève l’INAO dans son communiqué.

Dispositif d’évaluation des innovations

En 2023, le CNAOV entrouvrait par ailleurs la voie à l’intégration, dans les cahiers des charges, de pratiques culturales ou œnologiques innovantes, de nature à répondre aux enjeux climatiques, écologiques et sociétaux. Certains ODG n’ont pas tardé à activer ce nouveau levier baptisé Dispositif d’évaluation des innovation (DEI) et lui aussi bien évidemment strictement bordé puisque cantonné des expérimentations à petite échelle et pour une durée donnée. La commission scientifique technique et innovation du CNAOV vient ainsi de valider la mise en œuvre d’un DEI de l’AOC Cognac visant à expérimenter une méthode de chauffage à la vapeur par échangeur externe, à même de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

En Alsace, c’est le projet de bâchage biodégradable destiné à lutter contre les adventices qui a reçu un avis favorable pour les AOC Alsace et Crémant d’Alsace. Les AOP Luberon et AOP Ventoux ont quant à elles reçu l’aval du CNAOV pour expérimenter une technique de désalcoolisation, reposant sur une méthode d’évaporation partielle de l’alcool contenu non pas dans du vin mais dans du moût en fermentation.

A noter enfin, lors de la réunion du Comité, l’approbation de la demande de reconnaissance en AOP Laudun de la future ex-AOP Côtes du Rhône Villages – DGC Laudun, s’inscrivant dans le processus de hiérarchisation de l’appellation régionale Côtes du Rhône. « Segmentation du marché, changement climatique, attentes sociétales dans un contexte économique difficile : les principaux dossiers étudiés témoignent de la mobilisation collective de la filière pour s’adapter », conclut l’INAO.