[Rétro 2024] En août, les maladies vectorielles cernent la France ruminante

L’irruption du sérotype 3 de la FCO à la frontière belge accroit la pression sur les élevages de ruminants, confrontés à la FCO-8 dans le sud-ouest et, depuis la fin 2023, à la MHE sur la moitié du territoire, ouvrant une nouvelle brèche de vulnérabilité pour des filières déjà fragiles, avec pour dénominateur commun, le changement climatique. En attendant les Assises du sanitaire animal.

L’irruption du sérotype 3 de la FCO à la frontière belge accroit la pression sur les élevages de ruminants, confrontés à la FCO-8 dans le sud-ouest et, depuis la fin 2023, à la MHE sur la moitié du territoire, ouvrant une nouvelle brèche de vulnérabilité pour des filières déjà fragiles, avec pour dénominateur commun, le changement climatique.

Le 5 août 2023, un premier foyer de FCO-3 est identifié dans le département du Nord, puis un deuxième dans l’Aisne et un troisième dans les Ardennes trois jours plus tard. Détecté pour la première fois en Europe aux Pays-Bas en octobre 2023 avant de s’étendre en Belgique, le sérotype 3 passe la frontière malgré l’instauration, quelques jours plus tôt, d’une zone régulée par les autorités sanitaires. Il faut dire que moucherons piqueurs du genre Culicoïdes, vecteurs du virus, se moquent des frontières et des barrières virtuelles.

Carte de la zone régulée et des foyers de FCO-3 en date du 26 décembre 2024 (Source : ministère de l’Agriculture)
Carte de la zone régulée et des foyers de FCO-3 en date du 26 décembre 2024 (Source : ministère de l’Agriculture)

A l’automne 2023, ces mêmes moucherons avaient passé la frontière espagnole pour transmettre une autre virose, la Maladie hémorragique épizootique (MHE), à des élevages bovins des Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées, avant de coloniser, en 2024, l’ouest d’une diagonale reliant Cherbourg (Manche) à Marseille (Bouches-du-Rhône), pour finir l’année avec le recensement de 9044 foyers. Manque de chance, l’automne 2023 est aussi celui de la résurgence du sérotype 8 de la FCO, avec plus de 2000 foyers répertoriés dans le sud du Massif central, avant de gagner d’autres régions.

Course à la vaccination

Anticipant l’arrivée de la FCO-3, le ministère de l’Agriculture avait pris des dispositions pour faire homologuer des vaccins dédiés. Gratuite et volontaire, la campagne de vaccination démarrera à compter du 14 août au sein d’un zone régulée longue de 150 km entre le Pas-de-Calais et la Moselle, susceptible de protéger 600.000 ovins et 2 millions de bovins. En novembre, le ministère de l’Agriculture commande un stock supplémentaire de 2 millions de doses contre la FCO-3, présente dans 40 départements et désormais objet d’une régulation sur presque tout l’Hexagone.

Carte de la zone réglementée au titre de la MHE à partir des foyers du sud-ouest en date du 26 décembre 2024 (Source : ministère de l’Agriculture)
Carte de la zone réglementée au titre de la MHE à partir des foyers du sud-ouest en date du 26 décembre 2024 (Source : ministère de l’Agriculture)

En ce qui concerne la MHE, l’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) délivre une Autorisation provisoire d’utilisation (ATU) à l’Hepizovac. En septembre, le ministère de l’Agriculture lève le voile sur la stratégie vaccinale, consistant à dresser une barrière sanitaire s’étirant de la Manche aux Bouches-du-Rhône, en passant par l’Eure-et-Loir, l’Indre, le Puy-de-Dôme, et l’Ardèche, englobant plus de 2300 communes dans 20 départements, au sein desquelles les éleveurs de bovins peuvent faire vacciner, gratuitement, leurs animaux. Fin décembre, la France comptait 3538 foyers de MHE, 21 départements étant éligibles à la vaccination gratuite jusqu’au 31 janvier 2025.

Un carburant à la poussée de fièvre agricole

L’irruption de la MHE va alimenter la poussée de fièvre du début de l’année 2024 et durant toute l’année, le gouvernement se livrera à une véritable course poursuite à la vaccination et aux indemnisations. Les premiers engagements financiers portent sur la prise en charge à 80% des frais vétérinaires et des pertes directes, avant le déblocage d’un fonds d’urgence de 50 millions d’euros au bénéfice des éleveurs les plus en difficulté. Le ministère se suractivera aussi sur le front de la diplomatie sanitaire, pour faire en sorte que la circulation et le commerce des animaux soient le moins possible impactés, sans toutefois parvenir à éluder complètement la désorganisation induite par les règles sanitaires.

Au Sommet de l’élevage, le Premier ministre Michel Barnier annonce une enveloppe de 75 millions d’euros « immédiatement disponible » pour faire face à la FCO-3. Ce faisant, il ferme à la porte à une indemnisation de la FCO-8, au grand dam de la Confédération paysanne, au motif que la FCO-8 n’est pas une maladie émergente mais réglementée, en l’occurrence depuis le 1er janvier 2018. La FCO-8 relève ainsi du Fonds de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE), bien trop chichement doté selon la Conf’, au regard des dégâts engendrés par la maladie.

A la mi-novembre, le ministère de l’Agriculture élargira le périmètre du fonds de 75 millions d’euros, en rendant éligibles les pertes directes causées par la FCO-8 tandis que celles dues à ce même sérotype chez les bovins pourront prétendre au FMSE. A la mi-décembre, les éleveurs victimes de la FCO-3 recevront les premiers acomptes d’aide.

En dépit de la réactivité et du soutien des pouvoirs publics, les éleveurs de ruminants ressortent un peu plus fragilisés par l’émergence de ces maladies vectorielles dont l’Anses établit le lien avec le changement climatique, et dont les impacts exhaustifs restent à documenter. Ce sera peut-être l’objet, parmi bien d’autres, des Assises du sanitaire animal programmées pour ce début d’année par le ministère de l’Agriculture.

Les 12 temps forts de 2024, année erratique :

En janvier, les paysans sur le bitume, le Premier ministre sur la paille

En février, au Salon de l’agriculture, le soulèvement de terriens

En mars, on plante des haies et en octobre, on plante le Pacte

En avril, la France gagne une bataille contre l’Influenza aviaire

En mai, la loi d’orientation agricole adoptée… pendant 12 jours

En juin, la bio atteint son plafond de vert

En juillet, la pire moisson depuis 40 ans

En août, les maladies vectorielles cernent la France ruminante