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Météo : janvier entre conditions printanières, rivière atmosphérique et hautes pressions
Après un mois de décembre 2021 doux, mais avec une inégale répartition des précipitations ainsi que de l’ensoleillement, ce mois de janvier 2022 fut globalement très anticyclonique, ce qui est une récurrence depuis l’automne 2021 en France et plus généralement sur l’Europe de l’Ouest. Le bilan avec Nicolas Le Friant, météorologiste chez DTN.
Quel est le bilan météo du mois de janvier 2022 ?
Nicolas Le Friant : Les 5 premiers jours de l’année 2022 furent printaniers, et le 1er janvier, les températures maximales ont atteint les 16°C à 18°C sur la moitié nord et régulièrement les 20°C à 24°C au sud et même 25°C (soit le seuil de chaleur en météorologie) entre Oloron, Orthez et Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques) ! Par la suite, les températures ont nettement baissé pour rejoindre les valeurs de saison sous des conditions météorologiques très perturbées.
A compter du 11 janvier, les températures ont nettement fléchi et sont restées situées en-dessous des normales climatiques jusqu’à la fin du mois en raison de la présence et de la persistance de conditions anticycloniques. Grâce au pic de douceur observé en tout début de mois, les températures ont été finalement de saison avec un léger déficit pour les valeurs minimales et un petit excédent pour les valeurs maximales. Enfin, il est à noter que certaines régions (surtout au sud) ont atteint les 15 à 20 jours de gelées, ce qui est très remarquable mais rien d’anormal finalement avec ce temps durablement calme et anticyclonique.
L’ensoleillement fut très inégal car les hautes pressions hivernales ne sont pas automatiquement synonymes d’un ciel bleu de l’aube au crépuscule comme c’est très souvent le cas en été. En effet, étant donné sa fréquente position sur nos régions septentrionales, l’anticyclone a généré peu de vent, ce qui a bloqué une importante humidité dans les basses couches de l’atmosphère. Résultat, de très nombreuses journées se sont déroulées sous une grisaille persistante sur la moitié nord à l’exception des reliefs comme nous pouvons fort bien le constater sur l’image satellite du mercredi 26 janvier 2022 à 12h00.
D’une manière générale, des records d’ensoleillement ont été battus dans le sud, comme à Millau (12), Montélimar (26), Cahors (47), Mende (48) ou encore Brive-la-Gaillarde (19) et Carcassonne (11), alors que de nombreuses régions situées plus au nord ont connu un important déficit de luminosité comme à Caen avec -45%, Lyon avec -30% ou encore Nantes avec -25%. A l’échelle du pays, le déficit est peu marqué avec seulement 6%.
Concernant les précipitations, si l’on excepte le début du mois, les conditions météorologiques furent très sèches avec peu ou pas de pluies sur certaines régions. C’est le cas du quart sud-est où les périodes de Mistral et de Tramontane ont alterné avec des situations calmes et anticycloniques. En conséquence, nous n’avons relevé que de 0 à 2 mm de précipitations entre Saint-Mandrier (83), Montpellier (34), Marignane (13), Nîmes (30), Sète (34) et Orange (84). A Nice, le cumul atteint 11,3 mm mais il n’a plu qu’une seule journée (le mercredi 5 janvier) et le déficit est ainsi de 84%. Rappelons qu'au cours d'un mois de janvier normal, il tombe entre 50 et 70 mm sur ces régions. Ce gros déficit fait craindre une sécheresse importante pour la saison chaude, notamment si le printemps venait à être sec. Seul un petit quart sud-ouest a connu un excédent mais c’est essentiellement au cours des journées des 9 et 10 janvier où les précipitations sont tombées. On notera, par exemple, un excédent de 15% à Toulouse avec 59 mm dont 50 mm pour ces deux seules journées précédemment citées.
Que s'est-il passé lors de l'épisode très pluvieux des 9 et 10 janvier dans le sud-ouest, qui a valu le déclenchement de vigilances rouges concernant les paramètres précipitations et crues ?
Nicolas Le Friant : En provenance directe des latitudes tropicales, une masse d’air très doux, mais surtout très humide, a contourné l’anticyclone des Açores et s’est rabattue, au sein d’un flux de nord-ouest dynamique, sur l’ouest de la France sous la forme d’une perturbation active. Ce phénomène est appelé « rivière atmosphérique ». Non seulement les précipitations ont été abondantes, mais surtout le front est resté positionné pendant 48 heures sur les mêmes régions, bloqué par la présence de deux anticyclones, l’un situé sur le proche Atlantique et le second sur l’Europe. Sur la totalité de l’épisode, il est tombé 191 mm au poste EDF de Barèges (65) et 184 mm à celui d'Artigues (65), 183 mm à Augirein (09), 179 à Argelès-Gazost (65), Laruns-Hourat (64), 163 mm à Iraty, 139 mm au poste EDF de Castillon (64) et 138 mm à Boutx-le-Mourtis (31). En conséquence, les rivières pyrénéennes ont été toutes en crue (fonte des neiges en parallèle en altitude) et la Garonne a atteint un pic de crue de 4m31 à Toulouse, soit la deuxième valeur la plus élevée à égalité avec la crue du 20 mai 1977 et à 7 cm du record du 11 juin 2000.
Quelles sont les prévisions météorologiques en France pour la première décade du mois de février ?
Nicolas Le Friant : Pour ce début février, l’évolution météo est à fiabiliser dans la chronologie, mais nous devrions rester sous l’influence de bordure anticyclonique d’ouest à nord-ouest, avec une bonne douceur (pas des gelées matinales en plaine), mais aussi de petits fronts faibles à modérés, qui concerneront surtout les régions du nord et de l’est (peu de précipitations sur l’ouest et le sud). Le Mistral et la Tramontane étant récurrents près de la Grande Bleue, nous n’envisageons toujours pas de pluies.
A partir du 4 et du 5 février, les hautes pressions devraient plus franchement se replier et nous pourrions, ainsi, débuter une période nettement plus perturbée avec le passage de fréquentes perturbations pluvieuses en plaine et neigeuses en montagne. Le tout s’accompagnant de vents assez forts et de températures plus ou moins de saison.