Les agriculteurs vont-ils boycotter le salon de l'agriculture?
Certains souhaitent ne pas y aller, d'autres au contraire veulent en faire une chambre d'écho de leurs revendications. À moins d’un mois de l’ouverture du Salon international de l’Agriculture, qui se déroulera du 24 février au 3 mars, que réservent les protestataires à ce grand rendez-vous d'ordinaire immanquable?
Le malaise agricole croît et les blocages se multiplient partout en France. La FNSEA et les JA sont désormais aux portes de Paris. D’autres corps de métiers se sont ajoutés au mouvement. Blocages, manifestations et pourquoi pas un éventuel boycott du Salon international de l’Agriculture ? Véronique Le Floc’h, présidente de la Coordination rurale, a posé un ultimatum sur BFMTV le 24 janvier. "Si aucune réponse n'est apportée rapidement, ils (ndlr les politiques) savent très bien que le Salon de l'Agriculture pourrait avoir chaud", a-t-elle menacé. Hormis cette revendication très claire du deuxième syndicat de France, la FNSEA, la Conf’ et le Modef réservent encore leur réponse. Laurence Marandola, présidente de la Confédération Paysanne, n’a pas non plus tranché. “Il est trop tôt pour le dire. Les jours passent et on ne peut pas encore se prononcer sur notre présence sur le salon”.
Le boycott, une idée largement partagée sur les réseaux sociaux.
Certains voient dans le boycott du Salon, un levier de pression supplémentaire. Rappelons que le SIA représente 1% de la population française en termes de visites. Un salon sans agriculteurs c'est une idée défendue par des militants. Sur le réseau social X (anciennement Twitter), le très suivi Cédric alias @agric15 avait publié le 20 janvier dernier, “il faut boycotter le salon, pas d’agriculteurs présents, c’est la meilleure solution. Le retentissement serait énorme”.
Il faut boycotter le salon
— Cédric (@agric15) January 20, 2024
Pas d agriculteurs présent c est la meilleur solution.
Le retentissement serait énorme
Un message partagé et largement relayé par d’autres agriculteurs y compris par Jérôme Bayle, éleveur bovin, leader du mouvement : “on est prêts à monter à Paris, boycotter le Salon de l’Agriculture, paralyser la capitale avec nos tracteurs”.
Le salon de l’agriculture, une énorme médiatisation
“Ne pas venir au salon, c’est se tirer une balle dans le pied, alerte Jean-Luc Poulain, président du SIA. C’est un très bel outil de communication, pour le monde agricole. Avec plus de 2000 journalistes accrédités”, c’est l’occasion pour les agriculteurs de s’exprimer, de présenter leur métier et de dialoguer avec le public et les politiques. Dernièrement, le salon de l’agriculture s'est rangé du côté des agriculteurs, en affirmant son soutien dans un communiqué de presse. “Je comprends leur colère, ça fait 43 ans que je fais ce métier néanmoins il faut réfléchir aux actions qu’on fait, quelles causes elles servent ou elles desservent”, poursuit le président qui effectue cette année son dernier mandat. Le site du salon de l’agriculture relate l'importance de l'évènement : 8 532 retombées presse, web, radio et TV ainsi que 4,5 millions de personnes touchées sur les réseaux sociaux.
Un public toujours au rendez-vous
1100 exposants ont été confirmés cette année et le “salon sera encore plus grand que jamais, puisqu’on est sur une progression de 4,8 % de m2 vendus”, explique Jean-Luc Poulain. Le président espère dépasser le nombre de 615 000 visiteurs de l’année dernière. Il rappelle aussi la hausse de visites officielles avec le protocole. “Il y a une dizaine d’années, on était autour de 15 à 20 visites, l’année dernière on en a organisé 82. Le salon de l’agriculture facilite la communication entre les hommes politiques de tous bords et les agriculteurs”. Ce n'est pas la première fois que le salon se déroule pendant une crise sociale. Lors de la 57e édition, en 2019, le SIA avait été maintenu en pleine crise des gilets jaunes. Le président Macron avait eu une visite mouvementée où l'on accusait le chef d'État d'"agri-bashing". Cette année encore la plus grande ferme de France ne semble donc pas menacée par les manifestations. “On encourage le dialogue même si les discours ne convainquent pas toujours", relativise Jean-Luc Poulain.
Des changements prévus
Cette année, le salon de l'agriculture fête ses 60 ans et propose quelques changements dans son déroulé. Suite aux débordements de l’année dernière en raison d’un grand nombre de personnes alcoolisées, le salon va renforcer la prévention grâce à des moyens de communication le “SIA attitude”. Le but est de mettre en garde les vendeurs et les consommateurs. Cette année sera aussi l’inauguration d’un espace pro, ouvert pendant 3 jours et réservé uniquement aux professionnels. Débats, forums et échanges seront proposés aux agriculteurs.