L’Apad vend ses premiers crédits carbone

L’association dédiée à l’agriculture de conservation des sols prend l’initiative de commercialiser dans une démarche collective les crédits carbone de ses adhérents. Pour ce faire, elle s’appuie sur la labellisation bas-carbone grandes cultures du ministère de la transition écologique.

À l’occasion de l’édition 2022 du Salon de l’agriculture, l’Apad a annoncé devenir porteur de projet pour une labellisation collective bas-carbone. Au total, ce sont 230 exploitations, pratiquants l’agriculture de conservation des sols (ACS) et adhérentes de l’association, qui lui ont confié leur mandat afin de commercialiser leurs crédits carbone. Selon l’association, cela représente 40 000 ha ou encore 200 000 crédits carbone estimés sur la période d’engagement de cinq ans.

« Nous avons sollicité les 300 adhérents de l’association qui avaient obtenus notre label « Au cœur des sols » et qui étaient donc arrivés au bout de la démarche ACS », précise François Mandin, le président de l’Apad. La conférence de presse qui se tenait le 28 février a été l’occasion de signer le premier contrat de vente pour l’équivalent des crédits carbone de deux fermes avec SEDE Environnement, une filiale de Veolia spécialisée dans la valorisation de déchets organiques.

Paul-Antoine Sebbe, président de SEDE Environnement et François Mandin, président de l’Apad, signent un contrat d’achat de crédits carbone pour l’équivalent de deux fermes (crédits photo : Tanguy Dhelin).

Des crédits carbone locaux et équitables

Pour la vente de ses crédits carbone, l’Apad a fixé un prix plancher à 60€/tonne de CO2 évitée. Ce chiffre a été fixé afin de garantir une ressource économique équitable pour les agriculteurs. « Nous ne voulons pas brader ces crédits carbone », souligne Diane Masure, vice-présidente de l’Apad, qui a dirigé le groupe de réflexion autour du projet « Du carbone au cœur des sols » au sein de l’association.

Auprès des potentielles entreprises acheteuses, l’association justifie ce prix relativement élevé par les co-bénéfices engendrés par les pratiques d’agriculture de conservation des sols, notamment la lutte contre l’érosion des sols et le fait de favoriser la biodiversité. « Nous ne nous interdisons pas d’introduire d’autres critères », précise Diane Masure. L’aspect local et français des crédits carbone vendus est également mis en avant. Ainsi, pour une entreprise qui voudrait compenser son empreinte carbone via une action sur son territoire, il sera toujours possible de trouver une ferme de l’Apad à proximité.

Toujours dans l’idée de garantir une rémunération équitable aux agriculteurs, l’Apad s’est positionnée en porteur de projet sur l’ensemble des maillons du processus de labellisation, afin d’éviter la multiplication des intermédiaires. Une indexation du prix sur le cours du carbone est également prévue. Ainsi, si ce dernier augmente durant la période d’engagement de cinq ans des entreprises, les agriculteurs ne seront pas lésés.

Le modèle du label bas carbone grandes cultures

Pour garantir et certifier les crédits carbone des fermes qui l’ont mandatée, l’Apad a utilisé le modèle « grandes cultures » du label bas-carbone du ministère de la transition écologique. François Mandin justifie ce choix en évoquant notamment la « crédibilité auprès des entreprises » de cette labellisation. « Le fait que le ministère se lance sur la labellisation, ça nous a permis de nous projeter dans ce projet », explique-t-il.

Cette méthode permet de valoriser les deux aspects dans lesquels est impliquée l’ACS. D’une part la réduction des émissions de gaz à effet de serre avec un nombre de passages d’engins réduit dans les parcelles, et d’autre part le stockage du carbone dans le sol qui est la résultante du non-labour, mais également de l’implantation de couverts végétaux et de la diversification des rotations.

Le label bas-carbone grandes cultures a également un avantage primordial pour l’Apad. Il offre deux options, soit le scénario spécifique qui consiste à mettre en place des leviers pour réduire les GES sur son exploitation, soit le scénario générique qui s’adresse aux agriculteurs ayant déjà mis en place des actions et qui compare ces dernières à la moyenne des fermes du territoire. C’est cette deuxième méthode qui enthousiasme les adhérents de l’association. « Heureusement que ce modèle existe pour pousser les gens qui ont déjà mis des choses en place sur leur exploitation. Le problème est que les entreprises cherchent à financer une transition. Mais nos modèles agronomiques sont toujours en transition. Si nous changeons nos pratiques, le niveau de carbone dans le sol redescend très rapidement », souligne François Mandin.