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Influenza aviaire 2022-2023 : le nouveau plan d'action du ministère
Claustration, autotests, audits et vides sanitaires : le ministère de l’Agriculture a présenté les grandes lignes d’un plan d’action destiné à pallier les failles en matière de détection, de surveillance, de biosécurité et de gestion de crise. Si la question de la dédensification n’est plus taboue dans le Sud-Ouest, elle reste en suspens dans le Grand Ouest.
1378 foyers en élevages, 19,3 millions de volailles abattues, 300 millions d’euros d’aides sanitaires et 800 millions d’euros d’aides économiques : tel est le bilan de l’épizootie de grippe aviaire pour la saison 2021-2022. Des chiffres record, en dépit de la mise en œuvre à l’été 2021 d’une nouvelle feuille de route. Celle-ci s’était traduite notamment par la mise à l’abri de toutes les volailles en situation de risque élevé (survenu le 5 novembre 2021) et en risque modéré (dès le 10 septembre) dans les Zones à risque particulier (ZRP) pour toutes les volailles et pour les palmipèdes en Zones à risque de diffusion (ZRD). Eu égard aux « failles » identifiées par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et à la nécessité de donner de la « visibilité » aux éleveurs et aux filières, le ministère de l’Agriculture a décrété un nouveau plan d’action, co-construit avec les représentants des éleveurs et des filières.
Les règles de claustration maintenues, mais...
Sans surprise, les dispositions relatives à la mise à l’abri des animaux et spécifiées dans l’arrêté ministériel du 29 septembre 2021 restent effectives. « Au vu contexte épidémiologique, avec un virus qui continue de circuler dans la faune sauvage, il n’est pas question de baisser la garde », justifie le ministère. Mais ce dernier ouvre la porte à d’éventuels aménagements dans deux directions que sont les typologies de mise à l’abri d’une part (spécifiées en annexe de l’arrêté et éventuellement révisables) et d’autre part les durées de mise à l’abri, en vue d’en réduire l’impact. Sur ce dernier point, le ministère veut explorer la possibilité d’adapter « plus finement » les passages en niveau de risque modéré ou élevé, qui sont aujourd’hui décrétés au niveau national « du jour au lendemain », en identifiant des indicateurs à échelle régionale et zonale, et filière par filière. Dans les deux cas, l’expertise de l’Anses sera sollicitée.
Autotests et audits
Pour déjouer les failles en matière de détection précoce, le ministère veut promouvoir l’usage de kits de détection par les éleveurs, des dispositifs « simples ». Ces autotests seront couplés à des audits de biosécurité réalisés par des intervenants extérieurs. Le plan d’action prévoir aussi l’instauration d’un audit de biosécurité en élevage, dont la réalisation serait imposée « avant octobre ».
S’agissant du financement des kits la question est « en suspens ». « L‘Etat met beaucoup d’argent et un accompagnement inédit sur les aspects sanitaires et économiques », affirme le ministère, évoquant la prise en charge des pertes économiques sur des périodes de 150 jours (dite i2) et 120 jours supplémentaires (dite i3) au-delà des périodes de restriction, avec des taux d’indemnisations distincts, en cours d’arbitrage. Au passage, l’Etat a actualisé les valeurs marchandes objectives des animaux eu égard à l’envolée des coûts de production. Il va aussi accélérer le processus d’indemnisation en procédant à la validation des dossiers d’aides sanitaires sans en passer par l’expertise comptable. « Il se peut que d’autres acteurs, en particulier les collectivités, envisagent d’accompagner la volonté d’aller plus loin en matière de biosécurité et de prévention dans les exploitations », escompte le ministère. Le renforcement de la biosécurité concernera aussi le maillon du transport et plus largement tous les intervenants en élevage.
Des vides sanitaires indemnisés dans le cadre d’un plan « Adour »
La densité d’élevage étant identifiée par l’Anses comme un des facteurs de diffusion du virus, le plan d’action entérine des baisses de densité dans la zone de production de palmipèdes à foie gras du Sud-Ouest, Dénommé plan « Adour », il a vocation à faire baisser les densités, voire à ne pas produire du tout, pendant la période la plus critique comprise entre janvier et décembre, au sein de 68 communes de quatre départements (Landes, Pyrénées Atlantiques, Hautes Pyrénées et Gers), moyennant indemnisation des éleveurs. Outre la réduction des risques, le plan « Adour » apportera en prime une solution à la pénurie de canetons, consécutive à l’épisode 2021-2022, et dont l’impact est de l’ordre de 30% à 40-45%, selon le ministère. Pour pallier le manque de canetons, certains éleveurs ont du reste décidé de produire du foie gras à partir des femelles, « avec des résultats plutôt favorables », relève le ministère. Charge au Cifog de mener à bien l’accord interprofessionnel dans les semaines et mois à venir, l’Anvol devant aussi lui emboiter le pas dans le Sud-Ouest.
Quid de la densité dans le Grand Ouest
Le ministère de l’Agriculture se montre beaucoup plus prudent sur la question de la densité d’élevages dans le Grand Ouest, qui a concentré 860 des 1378 foyers en élevages. Et pourtant, selon l’Anses, dans cette zone, « la multiplicité des productions, associée à la multitude d’opérateurs des filières correspondantes, intervenant dans toutes les activités d’élevages, est considérée comme très probablement le facteur de risque principal de la diffusion du virus ». Le ministère évoque « un sujet difficile et assez lourd qui nécessite de disposer d’une analyse claire de ce que l’on entend par niveau de densité ». Pour le ministère, la question d’une dédensification est prématurée. « Il faut prendre la pleine mesure de la façon dont notre élevage est organisé, de la façon dont les échanges se font entre les différents élevages et de voir comment on améliore la résilience d’ensemble de ce secteur. On a besoin de partir d’une analyse spatiale claire mais aussi d’un travail collaboratif très important, ce quoi a quoi on va s’employer dans les semaines et les mois qui viennent ».
La crise passée dans le Grand Ouest a aussi pointé avec acuité la vulnérabilité de la filière des élevages reproducteurs. Mais là encore, « il y a plein de questions pour lesquelles on n’a pas forcément les réponses immédiatement ».
Pas de calendrier sur la vaccination
Indépendamment du plan d’action 2022-2023, le ministère a aussi évoqué le dossier de la vaccination, présenté comme, « un outil complémentaire à tous les autres dispositifs de prévention et de surveillance » et dont le protocole expérimental a été acté en mai dernier sur palmipèdes. Les résultats sont attendus pour la fin de l’année et déboucheront, le cas échéant et après analyse de l’Anses, sur une proposition de stratégie vaccinale « au mieux au printemps et à l’été 2023 ». Le dossier de la vaccination se double d’un volet diplomatique tout aussi vital que le volet expérimental. Si le Conseil agricole de l’UE a entériné le 24 mai dernier la perspective de stratégies ciblées, reste à bâtir le cadre juridique européen et surtout à convaincre les pays tiers du bien-fondé de la vaccination, afin de nos pas hypothéquer les courants d'affaires des différentes filières avicoles à l'export.