GNR à près de 2 €/l : l’appel au secours de la FNEDT

Les entrepreneurs des territoires demandent instamment au gouvernement de rembourser la TICPE ainsi qu’une clause d’indexation du prix du GNR. Ils s’interrogent sur ce qui sous-tend les restrictions d’approvisionnement dans de nombreuses régions, sources de potentielles pénuries de carburant.

A la veille de mettre en branle les ensileuses automotrices, les épandeurs d’effluents et autres chantiers de préparation de sol, la Fédération nationale des entrepreneurs des territoires (FNEDT) lance un cri d’alerte. Ou plus exactement trois cris d’alerte. « Nous alertons le gouvernement sur l’envolée du prix du GNR et les difficultés à la répercuter sur les tarifs des prestations, sur nos problèmes de trésorerie liés à l’avance de la Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques et enfin sur les difficultés d’approvisionnement dans certaines régions, nos adhérents étant confrontés à des problèmes de rationnement et de fractionnement des livraisons » : telle est la charge portée par son président Gérard Napias.

Rembourser puis en finir avec la TICPE

Dès l’automne dernier, alors que le cours du pétrole suivait déjà une courbe ascendante, la FNEDT avait demandé aux pouvoirs publics d’anticiper le remboursement de la Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétique (TICPE). Le montant du remboursement partiel de TICPE sur le GNR, auquel les entrepreneurs ont doit (au même titre que les agriculteurs), s’était élevé à 0,1496 euro le litre l’an passé. Le remboursement intervient d’ordinaire le 1er mai pour les consommations de l’année précédente. « Pour certains de nos adhérents, le montant peut dépasser les 40 000 euros, indique Gérard Napias. Dans mon cas personnel, l’Etat me doit 22 000 euros, de quoi remplir une bonne partie de ma cuve de 18 000 litres ».

La FNEDT demande à l’Etat de supprimer à la source ce système de perception-remboursement de la TICPE. « Le ministre de l’Économie nous avait promis de la réduire avec le temps mais pour tout résultat, on a vu le GNR s’imposer à de nouvelles catégories de machines », dénonce Gérard Napias.

"Il n’a échappé à personne que l’on n’entend pas les transporteurs routiers malgré la hausse du prix du gazole"

La FNEDT réitère au passage une autre demande, consistant à mettre en place une clause d’indexation obligatoire du prix du GNR en pied de facture, comme c’est le cas pour les transporteurs routiers. « Il n’a échappé à personne que l’on n’entend pas les transporteurs routiers malgré la hausse du prix du gazole », pointe le président. Dans le secteur de la forêt, le FNEDT a obtenu des gages de la part de l’ONF pour réévaluer le prix des prestations fixé par contrat. Dans le secteur agricole, où l’établissement de simples devis n’est pas monnaie courante, c’est une autre paire de manches. « Soit on augmente le prix de nos prestations, soit on fait le plein chez le client », déclare Gérard Napias.

La FNEDT estime que pour un chantier de moisson, facturé en moyenne 130 euros, le coût de carburant qui était l’an passé de 15 euros est désormais de 30 euros, sans préjuger des augmentations quotidiennes en cours. « Les entreprises ont toujours misé sur les gains de productivité pour ne pas augmenter leurs tarifs, explique Guillaume Le Gonidec, chargé des travaux agricoles et environnementaux à la FNEDT. On arrive très clairement aux limites de ce système alors que nos investissements profitent aux agriculteurs. Sur une tonne à lisier de 18 000 litres, la mise en œuvre de pendillards ou d’enfouisseurs par nos entreprises équivaut à une économie nette de 165 euros d’azote pour le client ».

Le fractionnement, du rationnement qui ne dit pas son nom

Au-delà des coûts, la FNEDT s’interroge sur la disponibilité même du GNR, certains entrepreneurs se plaignant de difficultés d’approvisionnement. « C’est notamment le cas en Normandie, dans les Pays de la Loire, en Moselle, ou encore en Dordogne, déclare Patrice Durand, directeur de la FNEDT. C'est très hétérogène. D’autorité, certains distributeurs de carburant fractionnent, réduisent, allongent les délais, et à chaque report, le prix augmente. Nous n’en sommes pas à assigner pour refus de vente mais dans la relation entre un fournisseur et un client, il y a quand même un sujet ».

La FNEDT s’interroge sur une éventuelle stratégie gouvernementale consistant à privilégier l’approvisionnement des stations-services. La fédération pourrait-elle mettre des machines en travers des routes pour se faire entendre ? « Mon sens des responsabilités m’a toujours interdit d’avoir recours à ce genre de pratiques, déclare Gérard Napias. Mais j’ai de plus en plus de mal à tenir les délégués dans les départements ».