Élevage durable : pourquoi les systèmes pâturant permettent de s’adapter aux aléas climatiques

Le Sommet de l’Élevage, du 1er au 4 octobre prochains, mettra notamment à l’honneur l’ensemble des systèmes pastoraux français, qui incarnent une des clés de la durabilité dans l’élevage. Alors que les aléas climatiques causent de fortes disparités dans la ressource herbagère, pour Laurent Bouscarat, conseiller spécialisé eau à la Chambre d’Agriculture du Cantal et directeur d’Auvergne Estives, l’élevage à l’herbe permet, entre autres, une adaptation accrue vis-à-vis des conditions climatiques de plus en plus contrastées.

Pour commencer, comment définir les surfaces pastorales ?

La définition utilisée regroupe toute surface végétale spontanée, herbacée, arbustive ou arborée, qui est exclusivement vouée au pâturage. Les animaux vont s’y nourrir d’herbe, soit toute l’année, soit une partie de l’année. Ces surfaces permettent de trouver un équilibre au niveau de l’exploitation : les animaux qui y pâturent les valorisent, ce qui permet de libérer des surfaces dans les sièges des exploitations, afin de stocker de la ressource pour l’hiver. Dans le Massif central, 15 % des surfaces pastorales sont valorisées en collectif.

 

Que ce soit dans des systèmes d’estive collective ou non, quel est l’objectif dans un système pâturant ?

Il y a deux objectifs principaux à atteindre : que les animaux mangent de l’herbe de bonne qualité, donc au meilleur stade, et que cette ressource soit présente en quantité suffisante pour nourrir tous les animaux présents sur la zone d’estive. Il y a donc à la fois un enjeu de qualité et de quantité. Concernant le stade idéal de l’herbe, il faut qu’elle soit mangée avant le stade d’épiaison, pendant la phase de floraison. Le critère de hauteur de l’herbe peut aider, mais il n’est pas suffisant : certaines plantes peuvent être hautes alors qu’elles n’ont qu’une seule feuille, et d’autres plantes peuvent être plus courtes et déjà presque au stade d’épiaison. Le plus important reste de faire brouter l’herbe avant que l’herbe ne durcisse, donc avant le stade d’épiaison.

Au fil des années, les bergers et éleveurs ont pu acquérir un savoir-faire qui leur permet de s’adapter aux conditions, et donc à la pousse de l’herbe. C’est grâce à leur expérience qu’ils adaptent la conduite du pâturage aux variations. En plus, ils peuvent participer à des formations techniques organisées par la Chambre en complément, pour prendre du recul et faire évoluer certaines pratiques. Une chose est sûre : d’une année sur l’autre, la conduite du pâturage n’est jamais la même.

 

Justement, pouvez-vous nous citer des exemples d’adaptation sur des systèmes pâturant lors de périodes de sécheresse ?

Quand il fait très chaud, on peut décider d’installer le troupeau sur un quartier exposé au nord, par exemple. Si la sécheresse arrive, il faut anticiper et prévoir les semaines qui vont suivre : l’herbe commencera à moins pousser, donc il est possible de décider d’un report sur pied pour un ou plusieurs paddock(s). Ainsi, en laissant l’herbe sur pied pour le mois suivant, on maintient une quantité de ressources suffisantes, même si on risque de perdre en qualité. Une autre adaptation possible se trouve du côté du sylvopastoralisme. Il a été quelque peu laissé tomber dans le Massif central, mais quand il fait très chaud, l’ombre des arbres est bénéfique pour la pousse de l’herbe et les animaux. En cas de fortes chaleurs, on peut aussi jouer sur l’altitude de la parcelle où faire pâturer les animaux.

Il est aussi possible d’adapter les besoins des animaux. Par exemple, une vache qui est tarie n’a pas les mêmes besoins en eau qu’une vache en pleine production, en lactation, avec son veau. Au mois d’aout, qui est une période plus sèche, certaines surfaces sont un peu moins riches en diversité floristique, on peut donc y amener des animaux avec des besoins moins importants.

Enfin, la gestion du pâturage est très liée à la gestion de l‘eau. On peut donc travailler sur la disponibilité des points d’abreuvement et la qualité de l’eau. Un objectif peut être que les animaux aient le moins de distance à faire pour aller boire. Ils dépenseraient moins de calories pour se déplacer, ce qui aide dans la gestion du pâturage.

 

Y a-t-il des adaptations possibles en cas d’importantes précipitations ?

Oui, comme cette année : avec la quantité d’eau qu’on a eue, le risque est au contraire de se faire gagner par le volume. S’il pleut tout le temps, l’herbe pousse continuellement. Il faut faire tourner assez vite les animaux sur les différents paddocks (en cas de pâturage tournant) : tous les 10 jours dans certains cas.

 

Globalement, en quoi le système d’élevage à l’herbe permet de s’adapter au changement climatique ?

Les surfaces pastorales sont très diverses. Au sein d’une même estive, il peut y avoir différentes zones : humide, arborée… Toutes ces zones sont valorisables en fonction des aléas. Par exemple, les zones humides et arborées peuvent être valorisées quand il n’y a plus de ressources sur une autre parcelle, en cas de sécheresse. De façon globale, avec les différentes zones au sein d’une même estive, l’altitude et l’exposition des parcelles, l’élevage à l’herbe offre une marge de manœuvre beaucoup plus importante à l’éleveur pour valoriser au mieux la ressource, ce qui le rend plus résilient à des phénomènes climatiques extrêmes. 

Le Sommet de l’Élevage se déroulera du 1er au 4 octobre prochains, à la Grande Halle de Cournon-d’Auvergne (Puy-de-Dôme).

 

 

Plus d'informations :

Site internet : www.sommet-elevage.fr
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