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Chèque alimentaire (2/3) : les quatre enjeux du futur dispositif
Solidarité vis-à-vis des plus précaires, santé publique, soutien à l’agriculture française et faire-valoir de la transition environnementale et climatique : tels sont les objectifs assignés au chèque alimentaire, dont l’instauration est attendue cette année.
Face à l’accélération de la hausse des prix à la consommation (+4,5% sur un an à fin mars selon l’Insee), l’instauration d’un chèque alimentaire devrait figurer au rang des priorités du second quinquennat d’Emmanuel Macron. Mais l’initiative n’est pas totalement corrélée à la conjoncture. Au printemps 2021, dans le cadre de l’examen de la loi Climat et résilience, le député LREM Mounir Mahjoubi avait soutenu cette proposition, qui s’était effectivement traduite dans la loi Climat promulguée en août 2021. Mais l’article 259 ne sortait pas le chéquier : elle accouchait d’un rapport, à fournir dans les six mois et censé échafauder l’architecture du futur dispositif (bénéficiaires, produits éligibles, valeur faciale, financement).
Un chèque, quatre enjeux
Au cours de cette phase législative, le député avait néanmoins esquissé quelques lignes directrices : un chèque de 30 à 60 euros par famille et par mois, pour 6 à 8 millions de bénéficiaires, ciblant des produits frais sous signe de qualité, avec un retour à 85% en espèces sonnantes et trébuchantes aux agriculteurs, le tout pour un budget global compris entre quelques centaines de millions d'euros et deux milliards d’euros. Toujours selon son promoteur, le chèque serait porteur de quatre enjeux : un enjeu de solidarité au bénéfice des publics précaires, un enjeu de santé publique pour favoriser une alimentation de qualité pour tous, un enjeu économique en soutien à l’agriculture française et enfin un enjeu environnemental et climatique, avec la prédilection pour les produits vertueux.
Contrer les inégalités d’accès à une alimentation plus qualitative
Dans une note datée de décembre 2021, les Chambres d’agriculture s’étaient livrées à une analyse d’un dispositif encore largement en gestation. Elles soulignaient notamment sa logique de « sécurité alimentaire », telle que l’entend la FAO, intégrant non seulement l’accès à la nourriture mais aussi son caractère sain et nutritif, des propriétés attribuées aux produits durables (biologiques, locaux, labellisés, frais). Est-ce la priorité des personnes des plus défavorisées ? « L’alimentation responsable est une priorité qu’elles ne peuvent se permettre, relèvent les Chambres. Mais le chèque alimentaire permettrait à ces populations de faire ce choix (...), de leur offrir un meilleur accès à des produits durables et ainsi de contrer les inégalités d’accès à une alimentation plus qualitative (...). Un dernier argument pourrait porter sur la santé, car les produits responsables sont souvent associés à des bienfaits sanitaires ». Le chèque alimentaire n’irait donc pas à l’encontre des besoins des plus pauvres.
Vis-à-vis des agriculteurs, le chèque aurait pour vertu de soutenir la demande en produits durables, malmenée par l’inadéquation entre l’offre et la demande. Avec le Green Deal en ligne de mire, les Chambres d'agriculture estiment que l’initiative d’une aide alimentaire conditionnée aux produits durables pourrait aussi être proposée au niveau européen.
SNAP, le modèle américain
En ce qui concerne l’aspect budgétaire, l’analyse des Chambres tente de déminer le procès en « assistanat coûteux pour l’Etat » qui pourrait être instruit contre le chèque alimentaire. Sauf qu’aux Etats-Unis, « une étude l’USDA (ministère de l’Agriculture) datant de juillet 2019 a ainsi montré que le SNAP (Supplemental nutrition assistance program – programme d’assistance alimentaire) aurait un effet multiplicateur sur le PIB américain de 1,549. Selon les Chambres, le budget américain pour l’aide alimentaire est 150 fois plus élevé que celui de l’UE, et correspond aux deux tiers du budget annuel de l’USDA. Chaque année, 42 millions de personnes bénéficient de cette aide aux Etats-Unis. En 2019 et 2020, chaque ménage éligible a reçu en moyenne 240 dollars d’aide SNAP par mois... sans ciblage vers les produits durables.
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